Une culture du viol à la française de Valérie Rey-Robert, un livre glaçant et ô combien important
- Marion Marten-Pérolin
- 7 mars
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 30 mars
Une culture du viol à la française de Valérie Rey-Robert. Cet essai sur la culture du viol, à travers le monde et particulièrement en France, bouleverse le lecteur. L'autrice incite au changement des moeurs sur un sujet terrible qui touche les femmes, mais aussi les hommes.

Des affaires de viol, il y en a tous les jours. Des victimes, il y en a des centaines, des milliers, des millions. On comptabilise un viol ou une tentative de viol toutes les 2 minutes environ en France. Pour un total de plus de 200.000 viols ou tentatives tous les ans. Les femmes sont particulièrement touchées par ce fléau, mais des hommes sont aussi violés. Et les violeurs sont majoritairement (et à l'écrasante majorité) des hommes. Ce fait est presque impossible à affirmer - et donc à changer - tant les mentalités sont fermées. On ne peut pas dire que les violeurs sont presque tous des hommes, et c'est là tout le problème.
Le rôle de la presse ?
Dans la presse, on lit parfois des euphémismes sur les viols, on ne nomme pas les auteurs ou pis, on créé des monstres pour donner l'impression que les violeurs ne sont pas nos pères, nos frères, nos amis, nos voisins... Pourtant, il n'y a statistiquement pas un seul type de violeur, ils sont de toutes les origines possibles, ils sont jeunes, ils sont vieux. Ils ont des moyens, ils n'en ont pas. Il suffit de regarder de plus près les accusés de l'affaire Pelicot. Sur le banc des accusés que des hommes - qui ont abusé d'une femme sédatée par son époux. Des hommes d'une vingtaine d'années à plus de soixante-dix ans ! Ce sont des pères de famille, des pompiers, des époux, des journalistes... C'est une réalité qui dérange et l'autrice Valérie Rey-Robert déconstruit un discours qui tolère le viol, particulièrement en France où des traditions comme le droit de cuissage ou encore le troussage, sont une sorte de normes qu'on ne peut pas critiquer. Pour s'en convaincre, déjà, il faut lire cet ouvrage.
Ensuite, il est intéressant de décrypter les unes des médias qui ne traitent pas de la même manière un DSK accusé de viol, que ses amis défendent avec des arguments malheureux, ou un homme d'origine étrangère par exemple. On va considérer, et cet argument est repris par d'autres autrices féministes, qu'un étranger est un homme dangereux, qu'il n'y a que lui qui viole. Nos hommes, les patriotes, ne sont pas des monstres, ils ne violent pas (et politiquement cela sert l'extrême droite). On va alors faire quelque chose de TRÈS grave. On va minimiser leurs actes - à nos patriotes. On va plaider le dérapage. Vous comprenez, il n'est pas comme ça. On va alors chercher à critiquer la victime, fouiller sa vie intime et la rendre coupable (que ce soit une adulte ou une enfant d'ailleurs !) du viol qu'elle a subit. N'était-elle pas habillée trop court ?
Qu'est-ce qu'un viol ?
Pour rappel, la définition du viol est celle-ci : "Le viol est un acte de violence sexuelle qui implique une pénétration sans le consentement de la victime. Il peut être exercé par la force, la surprise, la menace, la ruse et par la contrainte."
Cette définition est difficile à comprendre pour certains car on hérite d'idées reçues sur le viol - il ne serait le fait que de monstres dans un parking, et donc il n'y aurait que des viols avec violence (dans notre esprit collectif). Pourtant, l'autrice rappelle que les viols sont essentiellement perpetrés par des personnes que l'on connaît. Sans violence, par la contrainte, la surprise. Et la représentation du viol par le surprise ou la contrainte, dans l'inconscient collectif, cela ne va pas de soi. Une femme qui est abusée parce qu'elle est ivre, qui est sidérée, une autre qui l'est par un proche, une femme droguée par son agresseur... Ce sont des éléments constitutifs du viol qu'on a du mal à accepter dans notre société. Il suffit de voir le procès qui a été fait à Gisèle Pélicot - victime sédatée violée plus de 100 fois à son insu par plus de 50 hommes pour satisfaire le plaisir sadique de son époux. L'autrice relève aussi un point important, le fait qu'on ne croit pas les victimes - celles qui parlent car de nombreuses préfèrent ne rien dire de peur des représailles et parce qu'on ne les croirait pas. Car on ne les croit pas depuis des siècles.
Le cas des fausses accusations
On théorise d'ailleurs sur les fausses accusations. Au profit de qui d'ailleurs ? De ces hommes qui ne veulent pas qu'on parle de viol. Il existe une négation de la parole des victimes qui fait peur. Pour moins de 10% de fausses accusations, on va considérer que 100% des femmes qui portent plainte pour viol sont des menteuses et remettre leurs versions en doute. Le plus glaçant étant parfois le traitement judiciaire : on va classer sans suite faute de preuve, ce qui ne veut pas dire qu'un viol n'a pas eu lieu, on va juger au tribunal pour agression sexuelle plutôt que pour viol aux Assises et on va donc, pour différentes raisons, complexifier un peu plus le parcours des plaignantes. Un autre élément, et non des moindres, le nombre de victimes de viol qui sont des hommes.
On ne peut pas considérer qu'un homme qui soit assez fort - plus fort qu'une femme - puisse se faire violer par un autre homme nous dit l'autrice. On va là aussi nier l'existence d'un viol sur un homme. Ce qui est catastrophique pour se reconstruire pour ces hommes dont la souffrance est aussi invisibilisée.
Il y a dans le viol une volonté de détruire, de soumettre. Les hommes, selon les statistiques présentées par l'autrice, qui violent, n'ont pas de problèmes dans leur vie sexuelle, ils sont souvent en couple, ont des relations. Ce qu'ils cherchent, ce n'est pas seulement la relation sexuelle et la satisfaction d'une envie. C'est l'écrasement de la volonté de leur victime. C'est l'expression de leur domination qui prévaut sur le consentement. Et le problème, c'est l'éducation de nos petits camarades, formés à la haine des femmes, éduqués à assouvir leurs envies, à ne pas supporter la frustration... et donc le refus.
Pourquoi lire Une culture du viol à la française de Valérie Rey-Robert ?
Ce qui m'a le plus bouleversée en lisant ce livre, ce sont les exemples de viol sur mineur, les cas de pédophilie qui ont été justifiés par la société, tolérés, acceptés. Et c'est inacceptable et ça, ça se passe en France. Je vous conseille de lire ce texte pour vous faire une idée du sujet, conforter ou non votre opinion sur le viol, revoir vos idées reçues, et ouvrir les yeux sur le sujet.