L'endométriose est une maladie chronique qui peut être invalidante. Si de nombreuses personnes en ont déjà entendu parler, rares sont celles qui en connaissent toute l'ampleur. D'autres ne souhaitent d'ailleurs pas s'y intéresser du tout, comme si la maladie des autres (et en l'occurrence celle des femmes) pouvait les contaminer. La Fondation pour la Recherche sur l'Endométriose a publié un sondage avec l'institut IPSOS en mars 2023, soit un peu plus d'un an après l'annonce par Emmanuel Macron d'une stratégie nationale sur le sujet, à l'occasion de la 19e Semaine européenne de prévention et d’information sur l’endométriose, du 6 au 12 mars 2023. Ce que pensent les 1500 personnes sondées est parfois surprenant...
Pas facile d'apprendre que l'on a une maladie chronique, et de longue durée. Encore moins facile de se poser des questions sur sa fertilité et sur la préservation de ses ovocytes. Peut-on devenir mère, en a-t-on envie ? Quel peut être l'impact de cette maladie sur le quotidien, sur la vie perso et pro ? L’endométriose et le travail sont difficiles à gérer ensemble. De nombreuses questions nous tombent dessus en même temps que l'on doit gérer des douleurs insupportables. On estime que 10 à 20% des femmes sont atteintes d'endométriose. Cela représente plusieurs millions de femmes en France et dans le monde.
L'endométriose et le travail : mal, mal, mal
Cette maladie est encore méconnue et mal prise en charge. On ne sait pas bien ce qui peut être remboursé (il faut souvent prendre une sur-complémentaire santé), on ne sait pas bien à qui s'adresser (il existe des centres spécialisés, dont le centre Tivoli à Bordeaux), ni comment ça va évoluer.
Les démarches sont longues, pénibles et incertaines. La demande d'ALD hors liste n'est pas si simple. La demande RQTH non plus, et elle peut prendre un an. Pourtant, les femmes ont un besoin urgent d'aide et de soins. Elles ne peuvent pas attendre 1 an pour se soigner. En outre, si ce n'est opérer, stopper les règles, il n'y a pas de traitement curatif à ce jour.. De nombreux symptômes existent et toutes les femmes n'ont pas le même niveau de douleurs. De nombreuses doivent même être hospitalisées.
Voici des données chiffrées de la Fondation Recherche Endométriose :
1 à 2 femmes sur 10 en âge d’avoir des enfants, soit 2 à 4 millions en France sont concernées
l'endométriose génère 21.000 hospitalisations tous les ans en France
70% des malades ont des douleurs handicapantes au quotidien
en moyenne, il faut 7 ans pour diagnostiquer la maladie
l’endométriose et l’adénomyose coûtent 9,5 milliards d’euros en France en soins médicaux et coûts indirects !
Témoignages et études sur l'endométriose
Face à cet état des lieux, on se demande pourquoi cela prend autant de temps de prendre en charge les malades. Car la fatigue s'accumule. Le stress et l'inquiétude aussi. Dans le perso, il faut faire face à l'incompréhension de certains proches, voire leur disparition. Dans un reportage diffusé sur LCP, une jeune maman témoigne en ce sens. Elle a fait du tri dans ses amitiés. Elle s'est recentrée sur ses besoins fondamentaux. Même si ce n'est pas facile à vivre, l'expression populaire "mieux vaut être seul que mal accompagné", prend tout son sens lorsque l'on est malade. Mais il ne faut pas s'isoler. Heureusement tout le monde n'est pas effrayé par la maladie et on garde près de soi les personnes essentielles. De plus, il est possible d'adhérer à l'association EndoFrance pour être accompagnée.
Parce que cette maladie ne se voit pas, qu'on se trimbale avec des bouillottes brûlantes à la maison, qu'on prend de la codéine et qu'on dort le plus possible, on n'est pas forcément entendues. Pis, on peut même nous faire des reproches sur nos symptômes ou nous dire qu'on somatise, que ce n'est pas si grave, que ça va passer, qu'on l'avait pas avant, qu'on n'a pas des lésions partout... Le comble. Et cela complique sérieusement la vie des femmes atteintes de cette maladie qui ne va pas disparaître du jour au lendemain.
Dans l'étude précitée de la Fondation Recherche Endométriose intitulée "Endométriose & travail : fin du tabou et début d’un new deal ?" on apprend que l'entreprise peut jouer un rôle clé dans l'accompagnement des personnes souffrant d'endométriose. Parce qu'on y passe quand même plusieurs heures par jour...
53% des Français estiment que les entreprises ont un rôle à jouer dans l’accompagnement des personnes atteintes d’endométriose.
Chez les 18-34 ans, la proportion est plus élevée, preuve selon l'étude, "d’une meilleure connaissance et d’attentes plus importantes des plus jeunes".
Au travail, cette maladie n'est pas encore bien prise en compte, même si les lignes bougent - heureusement ! Seulement, 14% reportent que leur entreprise a mené des campagnes de sensibilisation ou des actions en faveur des femmes atteintes. Je peux témoigner que la prise en charge est essentielle, quelle que soit la maladie. Toutes n'osent pas en parler, car elles pourraient être discriminées. Car il faut se justifier et ça, ce n'est pas du tout facile. De plus, toutes les personnes atteintes de maladie chronique n'en parlent pas forcément, endométriose ou autre.
Toutefois, je tiens à souligner le rôle essentiel de la médecine du travail. Qu'il s'agisse de l'infirmière ou du médecin, vous pourrez obtenir de précieux conseils et une vraie écoute. Dans mon entreprise, j'ai été suivie par ces personnes, même par les RH qui doivent appliquer les décisions de la médecine du travail, ce qui me soulage beaucoup. De plus, une assistante sociale peut vous aider dans vos démarches. Ne vous privez pas de ce soutien. Vous n'avez pas à dire à votre employeur votre pathologie, mais vous pouvez en parler avec la médecine du travail qui décidera d'un possible aménagement de poste pour rendre le quotidien moins difficile... car l'écoute, la compréhension, la bienveillance, vous l'aurez compris, cela ne va pas de soi pour tout le monde et il faut vous protéger. Il est important d'éviter le stress inutile, car c'est incompatible avec une maladie (quelle qu'elle soit).
Ce qui est sidérant se trouve dans ces chiffres : "Les Français sont assez divisés quant à la volonté d’en savoir plus sur l’endométriose (51%) ou non (49%) afin d’aider les salariées qui en souffrent. Ici, les hommes sont proportionnellement moins enclins à souhaiter se renseigner (44%) que les femmes (59%). Par âge, ce sont les 18-34 ans qui sont les plus avides d’information pour aider la cause (65% vs seulement 38% des 55-75 ans)".
Informer et prendre en compte ce sujet ne doit pas faire peur. "Un meilleur niveau d’information implique à la fois d’être mieux au courant du positif... mais aussi du négatif autour de la place de l’endométriose au sein de l’entreprise."
L'étude indique que les 18-34 ans (26%) feront plus attention aux actions mises en place par les entreprises que la moyenne et seront significativement plus susceptibles de noter les actions préventives prises par les entreprises que la moyenne des répondants (14%). Et d'ajouter que les "plus jeunes" constateront également "les difficultés et discriminations subies au quotidien par les femmes qui en sont atteintes (20% vs. 11% en moyenne)."
Il y a encore du chemin, mais ce sujet ne concerne pas que les femmes ou les couples. La santé au travail est un élément capital pour la réussite d'une entreprise. Bien traiter les salariés, faire attention, quelle que soit la pathologie, éloigne baisse de productivité (citée comme conséquence), impact sur la carrière des femmes (qui au passage se heurte à d'autres freins), turnover et situations difficiles à gérer pour les managers et salariées atteintes d'endométriose. Des solutions ? Flexibilité, aménagement du poste et formations...
Google et l'endométriose, ce que les gens cherchent
Si l'on regarde un peu ce que nous propose Google comme recherches on se rend compte de ceci : les personnes qui tapent le mot "endométriose" veulent une définition, connaître les traitements, l'impact sur la grossesse, les causes, se renseignent sur le centre à Bordeaux, les différents "niveaux" (profonde, digestive, superficielle) et les symptômes.
Les symptômes varient, on peut être fatiguée, avoir des douleurs aiguës un peu partout et j'en passe sur les fameux "DYS" expliqués par la gynécologue dans le reportage de LCP (dyspareunie, dysménorrhée, etc.). Le test se fait généralement par échographie, confirmé par IRM. On parle aussi de test salivaire.
A noter, qu'une endométriose superficielle peut faire aussi mal qu'une endométriose profonde. Et l'endométriose peut empêcher celles qui le veulent de devenir mères. Ce qui n'est pas une nouvelle facile à encaisser pour certaines, et l'incertitude non plus. D'ailleurs, certaines patientes découvrent qu'elles ont une endométriose lorsqu'elles essayent de devenir mères.
Les internautes se demandent aussi si l'endométriose peut être mortelle, si on l'a toute sa vie.. Bref, il faut encore beaucoup d'informations et d'investissements pour qu'on comprenne mieux cette maladie, qu'on l'accompagne mieux. Et qu'on ne culpabilise pas les femmes qui sont concernées. Pour conclure, j'ai envie de dire à toutes celles et à tous ceux qui s'intéressent au sujet ou qui sont malades : COURAGE!