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Photo du rédacteurMarion Marten-Pérolin

L'autre moitié du soleil de Chimamanda Ngozi Adichie : extraits et avis de lecture

Publié en 2006, ce roman d'une de mes autrices préférées a reçu l'Orange Prize. "L'autre moitié du soleil" de Chimamanda Ngozi Adichie est un livre terrible sur la guerre du Biafra au Nigéria. Une guerre clanique qui a fait des dizaine et des dizaines de milliers de morts à la fin des années 60. Découvrez ce roman et des citations dans cet article.

"L'autre moitié du soleil" de Chimamanda Ngozi Adichie : extraits et avis de lecture
"L'autre moitié du soleil" de Chimamanda Ngozi Adichie : extraits et avis de lecture

Mes chats ont dévoré la couverture de ce livre. De l'intérieur, je n'ai fait qu'une bouchée. "L'autre moitié du soleil" est un roman de Chimamanda Ngozi Adichie. Un roman terrible qui a d'ailleurs été adapté au cinéma.


A mes yeux de lectrice, ce roman d'environ 700 pages fait partie de la collection des petits pavés. J'avais tout de même hâte de le lire, car il était sur ma liste de lecture depuis un petit moment... Toutefois, je n'avais pas vraiment conscience du sujet de ce roman : la guerre du Biafra à la fin des années 60. Aussi, cette lecture est une véritable claque. Ce livre, attention, il est dur à lire. J'avais les traits tirés en lisant certains passages, notamment une scène de viol collectif, qui est un crime de guerre malheureusement courant. Mais le respect de la femme, et le féminisme, semblent encore désuets pour certaines personnes... Alors même que ces traumatismes se transmettent de génération en génération avec des problèmes de santé physique et/ou mentale.


J'ai aimé le style inimitable de Chimamanda Ngozi Adichie, qui, comme je le disais dans un autre billet doux, appelle un chat un chat. Féministe, elle propose des personnages féminins indépendants et/ou égaux des personnages masculins. Le lecteur découvre le rôle des Britanniques dans cette guerre et les scènes de massacres sont insoutenables. J'ai pleuré dès que j'ai lu le passage du roman dans le roman : "Le monde s'est tu pendant que nous mourrions". Un passage sur les enfants tués que les mamans ne peuvent abandonner en emportant avec elle ce qu'il en reste...




L'intrigue de ce roman de Chimamanda Ngozi Adichie


Ce livre est dédié à la mémoire des grands-parents de l'autrice, ses grands-pères qu'elle n'a pas connu, morts à la guerre, et ses grands-mères, qui y ont survécu. Il s'agit de la guerre du Biafra, une guerre entre le Nigeria et le Biafra qui a endeuillé le pays à la fin des années 60 avec environ 6000 morts par jour... soit plus d'un million de morts selon certaines estimations.


Plusieurs parties composent ce livre, le début des années 1960 et la fin des années 1960. L'autrice article les parties entre-elles de manière à nous dévoiler des clés de lecture. Elle nous surprend notamment avec une intrigue entre Olanna et sa jumelle et avec l'identité de l'auteur du roman dans le roman.


Les personnages sont tous attachants, Olanna, Kainene, Odenigbo, Ugwu, Richard... même si certains commettent l'impardonnable. Il me semble qu'un des plus beaux personnages de ce roman n'est pas Olanna, de qui on tombe presque amoureux, mais Kainene. Cette femme qui évolue tout au long du roman, qui part faire l'afia attack, c'est-à-dire se rendre en terre ennemie pour trouver des denrées alimentaires alors qu'elle s'occupe d'un camp de réfugiés qui se meurent. Sans médicaments, sans nourriture, parfois sans eau.


Ce roman sur la guerre nous montre ce qu'on ne voulait pas voir : la famine, le kwashiorkor (un syndrome de malnutrition sévère qui fait gonfler le ventre des enfants de 6 mois à 3 ans), les viols, les manigances internationales, les disparitions, le racisme, la violence. Et le monde s'est tu pendant qu'ils mourraient. 1 million de morts et des disparitions. Certaines familles ont enterré des cercueils vides... Au-delà du roman et de ce texte puissant, cette guerre pose la question des rivalités ethniques. De l'affreuse violence entre les hommes que l'on retrouve de tout temps et partout.


Petit coup de coeur pour des mots d'Ibo qui parsèment le texte : "Nkem" qui signifie ma mienne. "Omalicha", beauté, Ejima m, ma jumelle, Chidiebele dieu est miséricordieux ou encore "Olanna", Or de Dieu". La traductrice revient d'ailleurs sur "la réalité multiethnique et multilingue du Nigeria" que retranscrit avec brio Chimamanda.


De cette autrice, il me reste maintenant à lire le roman "Autour de ton cou". Mais comme Yasmina Khadra, je vais mettre un peu en pause... Le temps pour moi de continuer mon travail sur la guerre d'Algérie, ou la guerre tout court, et de découvrir d'autres auteurs, par exemple Sabyl Ghoussoub avec Beyrouth-sur-Seine, prix Goncourt des Lycéens 2022.


Extraits du roman "L'autre moitié du soleil"


"Elle regarda les nuages derrière son hublot, buissons de fumée flottant à la dérive, et se dit que tout étaient bien fragiles."


"Celui qui a dit qu'on était perdant à avoir des jumelles est un menteur."


"Comment les gens pouvaient-ils éteindre et rallumer la flamme de leur affection, brider et débrider ainsi leurs émotions."


"Un bref instant, elle formula le voeu irrationnel de pouvoir le quitter. Puis, plus rationnellement, elle formula celui d'être capable de l'aimer sans avoir besoin de lui."


"C'était ça, l'amour : un enchaînement de coïncidences qui prenaient du sens et devenaient des miracles."

"La musique n'a pas de frontières."


"'Nous vivons dans une période de grande malfaisance des Blancs. Ils déshumanisent les Noirs en Afrique du Sud et en Rhodésie, ils refusent de laisser les Noir américains voter, ils refusent de laisse les aborigènes australiens voter, mais le pire, c'est ce qu'ils font ici. Ce pacte de défense est pire que l'apartheid et la ségrégation, mais nous ne nous en rendons pas compte. Ils nous contrôlent en coulisse. C'est très dangereux!'"


"Et tu as tort de croire que l'amour ne laisse de place pour rien d'autre. Il est possible d'avoir de la condescendance pour quelque chose que l'on aime."


"'Tu as oublié d'où tu viens, et maintenant tu es devenu tellement imbécile que tu te prends pour un Homme Important."


"Quand il égouttait une casserole de haricots, le mot qui lui venait à l'esprit pour décrire l'évier visqueux était politicien."


"A l'indépendance, en 1960, le Nigeria était une collection de fragments tenus d'une main fragile."


"Quelle paix recherchons-nous ?"


"La vérité est devenue une offense."

"'Si le soleil refuse de se lever, nous le ferons se lever.'"


"Ce qui comptait, c'était que les massacres avaient transformé d'anciens Nigérians en ardents Biafrais."


"Tu sais ce qui m'a toujours stupéfaite ? (...) Que des Blancs civilisés mettent leurs jolis robes et leurs chapeaux et se rassemblent pour regarder un Blanc pendre un Noir à un arbre."


"Je ne pense pas que l'amour ait une raison. (...) Je crois que l'amour vient en premier et que les raisons suivent."


"Et la famine a fait dire à La Croix-Rouge internationale que le Biafra était sa plus grave urgence depuis la Seconde Guerre mondiale."


"Je crois que l'époque a eu raison de notre raison."


"-Grand-papa disait, en parlant des difficultés qu'il avait connues. 'Ça ne m'a pas tué, ça m'a rendu avisé'. O gburo m egbu, o mee ka m malu if."


"Grand-papa disait que ça empire toujours avant de s'arranger. O dikata njo, o dikwa mma."


"Il ne pourrait jamais décrire ce qu'il y avait de terriblement lugubre à bombarder des gens qui ont faim."



"Puissions-nous ne jamais oublier."





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