Le corps des femmes la bataille de l’intime de Camille Froidevaux-Metterieest
- Marion Marten-Pérolin
- 3 nov. 2024
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 7 nov. 2024
"Il n'y a pas une seule et bonne façon de vivre son corps féminin, pas plus qu'une seule et bonne façon d'être féministe", telle est la citation que je choisis pour résumer l'essai Le corps des femmes la bataille de l’intime de Camille Froidevaux-Metterieest.

Ce ne sont pas nos jupes qui sont courtes, mais vos mentalités.
Commençons par cette citation slogan sur la lutte des femmes à choisir leurs vêtements et à s'approprier l'espace public (qui leur est donc plutôt hostile selon le type de vêtements choisi).
Zoom sur la culture du viol
Si je sors avec une jupe courte, il y a un risque pour qu'un type (jeune ou vieux, riche ou pauvre), me reluque ou m'agresse verbalement, mais aussi sexuellement. Et puis on dira peut-être aussi que j'ai cherché ce qui m'est arrivé (croyez les campagnes de sensibilisation à ce propos). Si je choisis un décolleté idem. C'est d'ailleurs assez EFFARANT de devoir faire des campagnes de sensibilisation à ce propos.
A-t-on seulement fait une campagne sur les shorts (seul vêtement qui me vient à l'esprit pour faire une comparaison) des mecs, pour dire aux filles : ceci n'est pas une invitation au viol ? Cachez ce genou qui me déconcentre ? Moi perso, ça me déconcentre pas du tout, ça m'indiffère, et aussi je ne vais pas sauter sur un mec qui fait son footing torse-nu et on va pas lui dire qu'il l'a bien mérité si je le faisais. (Ceci n'étant que pour montrer l'absurdité du message qui nous fait croire que c'est de la faute de leurs vêtements que les femmes se font agresser. Non, c'est de la faute des agresseurs. Point.)
Dois-je rappeler que seulement 1% des cas de viols sont condamnés aussi ? Hum. Je vais le faire et sourcer que le Haut conseil de l'égalité entre les hommes et les femmes s'alertait en 2022... d'"une hausse des violences sexuelles de 33%; des plaintes déposées par moins de 10% des victimes ; 80% de plaintes classées sans suite dont seulement 1% aboutissent à une condamnation pénale".
"Le Haut Conseil s’inquiète de la diminution de 40% des condamnations pénales pour viol qui s’explique par une inacceptable requalification des crimes en délits et témoigne d’un manque criant de moyens, de formation et de compréhension des mécanismes des violences chez les professionnel·les chargé·es de les recueillir, les instruire et les condamner".
Là, vous la comprenez peut-être mieux la culture du viol.


(Imprimez bien ces images dans vos têtes)
Si je suis une jeune fille j'aurais probablement encore plus de regards malaisants (souvent lubriques) qui me feront préférer un jean pas trop moulant, une robe plutôt longue pour cacher ces seins, ce nombril, ces jambes qui rendent les hommes "fous".
Un penseur a rassuré la gente masculine sur ce genre de pulsion scopique en disant que lui aussi, les croptops, ça le déconcentrait. Il fait d'ailleurs une belle référence à la culture du viol (qui ne serait que véhiculée par le rap, ce qui imprécis et réducteur). >>https://www.youtube.com/shorts/eV8ymxfzCzk?app=desktop
La culture du viol, c'est aussi nier que monsieur "ordinaire" peut aussi en avoir la culture et oui, ça se PASSE concrètement à MAZAN où on a vu défiler un certain nombre de monsieurs "ordinaires" (ayant parfois des antécédents charmants) violer une femme sédatée.
La culture du viol, c'est aussi dire qu'on comprend, mais que ce sont les autres qui violent. Or, la culture du viol, c'est un peu partout finalement, dans les musiques, dans les films, sur les plateaux tv, et surtout sur des sites porno comme Coco (où on voit une vraie appétence aux scènes de soumission chimique ou soumission tout court, de violence, de hard, avec des vrais viols au passage, mais comment faire la différence me direz-vous ?).
Le porno, qu'on voudrait ethique, participe largement à la culture du viol. On va limiter l'âge légal d'accès à ces sites, car les jeunes garçons s'y rendent une fois par mois en moyenne dès 12 ans. Ils y voient des choses qu'ils voudront reproduire ensuite. Sauf que non, une femme on ne l'étrangle pas quand on lui fait l'amour comme ça automatiquement. Non on ne lui crache pas au visage, on ne lui met pas des gifles sans son consentement. Ah, on revient à cette notion de consentement tient donc. Une notion floue, et c'est là que se joue tout l'intime. Et la bataille autour du corps des femmes décrite par la philosophe Camille Froidevaux-Metterieest.
Et j'ai envie de dire à ce monsieur cité plus haut qu'il me fait penser à cette citation de l'essai : "Le vieux bonhomme n'a pas compris que son monde s'effondrait et qu'il n'y pouvait rien." Inutile donc de blâmer le rap qui n'est pas l'unique vecteur de la culture du viol.
L'autre problème, c'est qu'on n'éduque pas les garçons à respecter les filles, les femmes ensuite. Et le discours du monsieur n'est pas respectueux de ce qu'il se passe à Mazan, c'est la négation du viol et des sévices subits par Gisèle Pélicot. Et ensuite on se retrouve dans un imbroglio relationnel où les femmes refusent qu'on les traite si mal, jusque dans leur chambre à coucher. NORMAL.
Comme solution, l'autrice propose de déconstruire les mécanismes de cette société patriarcale dont on connaît les vices.
"Le genre renvoie aux processus par lesquels une personne ne devient femme ou homme, qu’au grès d'une dynamique d'intériorisation, des comportements et modes de pensée prétendument inhérents à son sexe de naissance. Il s'agit alors de repérer et de déconstruire les mécanismes par lesquels les individus se trouvent assignés à des choix de vie et à des fonctions supposés conformes, autant de mécanismes qui entretiennent les rapports de pouvoir caractéristiques de la société patriarcale."
Elle rappelle que "les femmes se situent toujours au cœur d'un enchevêtrement de rapports inégalitaires" et surtout qu'il n'y a pas une seule et bonne façon de vivre son corps féminin, pas plus qu'une seule et bonne façon d'être féministe".
Le rapport à la maternité, le rapport au corps des femmes dans Le corps des femmes la bataille de l’intime
La lutte pour le droit des femmes leur à permis selon l'autrice de choisir quand elles veulent (ou non) avoir des enfants. De ce droit découlent de nombreuses questions pour leur choix de devenir mère. Un statut qui coule de source lorsque l'on est une femme, mais que de nombreuses femmes hésitent à endosser.
Finalement, non, cela ne coule pas de source et elles peinent déjà dans leurs relations, dans leurs droits à un meilleur salaire, à des postes d'importance, etc. pour s'ajouter une charge supplémentaire parfois sans pouvoir compter sur le géniteur (et ceux-là on les entend pas beaucoup et on n'en parle pas suffisamment).
Il y a donc une lutte de l'intime, entre consentement, amour, reproduction, maternité... et tout cela avec un soin précieux laissé au choix de chacune de déterminer si oui ou non, elles souhaitent être mères et dans quelle mesure.
L'autrice évoque la PMA pour toutes et la parentalité dans sa globalité en taclant le slogan : un enfant = un papa + une maman. Force est de constater trop souvent un enfant = seulement une maman. "T'es où papa où t'es ?" Ça vous dit quelque chose ? Si cette chanson de Stromae à touché le coeur de tous, ce n'est pas pour rien. Dès que les choses se corsent (et les pères peuvent en être la cause, n'en déplaisent aux concernés), ils disparaissent et blâment la mère qui fait front, comme elle peut. Les enfants souffrent de l'éclatement de ce type de famille, c'est certain, mais n'y a t il pas une équation plus saine à trouver pour l'équilibre des enfants et des familles.
La famille patriarcale a t elle vraiment fait ses preuves pour qu'on s'attriste ou qu'on s'érige contre sa disparition (et qu'en gros on fasse la guerre aux discours féministes qui sont pro-choix et se veulent plus respectueux de la condition des femmes et des minorités). Je ne crois pas.
Je vous recommande cette lecture, par curiosité, si vous voulez vous forger une opinion sur les idées qui sont présentées. Cela ne veut pas dire qu'il faut être en accord avec tout, mais seulement se renseigner, lire, s'instruire et essayer de comprendre une partie de l'humanité.